Recommandations pour la pratique clinique du Collège National des Sages-Femmes de France du 06/12/2016
1. Une nouvelle définition des stades du travail
Les différents stades du travail ont été redéfinis suite aux publications américaines. La population des femmes a changé (âge du premier enfant, surpoids ou obésité maternels, poids des enfants à la naissance…). L’accompagnement et le suivi du travail (analgésie péridurale, déclenchement) ont également modifié le déroulement des accouchements. Enfin les méthodes de calcul des normes statistiques ont montré que les courbes de référence utilisées pendant un demi-siècle étaient lacunaires.
Le travail est divisé en 3 stades :
- 1er stade : période de dilatation cervicale jusqu’à 10 cm (dilatation complète) comprenant une phase de latence allant de la présence de contractions utérines régulières, associées à des modifications cervicales jusqu’à 5-6 cm de dilatation cervicale (versus 3 cm avant cette RPC) et une phase active période allant de 5-6 cm à 10 cm ;
- 2e stade : période allant de la dilatation cervicale complète jusqu’à la naissance de l’enfant
- 3e stade : période allant de la naissance de l’enfant jusqu’à la délivrance placentaire.
2. Une administration raisonnée d’oxytocine
Chez des parturientes en travail spontané, à terme, avec présentation céphalique, sans utérus cicatriciel ni retard de croissance, nous recommandons d’administrer de l’oxytocine qu’en cas de :
- dystocie pendant la phase active, c’est-à-dire si la vitesse de dilatation cervicale est inférieure à 1 cm/4h entre 5 et 7cm ou inférieure à 1cm/2h au-delà de 7cm. Il est par ailleurs recommandé de rompre la poche des eaux (amniotomie) et d’attendre une heure avant d’administrer de l’oxytocine.
- prolongation du 2e stade au-delà de 2h pour corriger une absence de progression de la présentation.
3. Modalités générales d’administration de l’oxytocine
- Il est recommandé d’établir au sein de chaque maternité un protocole de service formalisant les principes suivants :
l’administration par voie intraveineuse à l’aide d’un dispositif médical permettant le contrôle de la dose administrée et équipé d’une valve anti-reflux ;
la standardisation de la dilution et des débits exprimés en mUI/min ;
l’information de la patiente tracé dans le dossier médical.
Tous ces éléments doivent être mentionnés dans le dossier ainsi que la dose totale d’oxytocine administrée durant le travail en mUI.
- En cas d’administration d’oxytocine pendant le travail, il est recommandé d’enregistrer l’activité utérine et de surveiller le RCF de façon continue.
- Il est recommandé de débuter à une dose initiale de 2 mUI/min, de respecter des intervalles d’au moins 30 min avant chaque augmentation de dose. Ces augmentations se feront par dose de palier de 2 mUI/min, sans dépasser un débit absolu de 20 mUI/min. L’augmentation des doses sera arrêtée dès l’obtention d’une modification cervicale ou de 5 contractions utérines par 10 min.
4. Risques et effets indésirables maternels liés à l’administration d’oxytocine au cours du travail spontané
Les effets maternels indésirables concernent l’hyperactivité utérine, et l’hémorragie du post- partum (HPP).
5. Risques et effets indésirables fœtaux, néonataux et pédiatriques lors de l’administration de l’oxytocine au cours du travail spontané
Les effets indésirables rapportés concernent des anomalies du rythme cardiaque fœtal (RCF) liées à une hyperactivité utérine, la morbimortalité néonatale, l’hyponatrémie, l’ictère néonatale, et les difficultés néonatales de la succion. La survenue de trouble du comportement de nature autistique chez l’enfant et chez l’adulte liée à la prescription d’oxytocine en périnatal est une donnée actuellement fortement débattue sur laquelle il est impossible de conclure en l’état actuel des connaissances.
Conclusion :
L’administration d’oxytocine durant le travail spontané ne doit pas être considérée comme une prescription anodine. Les données actuelles, telles que rappelées dans ces recommandations, doivent inciter les acteurs de la périnatalité à la plus grande vigilance. L’oxytocine expose la mère et le fœtus à des effets néfastes pouvant avoir des conséquences à court terme et possiblement à long terme. Son administration doit faire l’objet d’un protocole et les indications doivent être clairement définies. Il est recommandé à chaque maternité de pouvoir évaluer son taux d’administration d’oxytocine durant le travail spontané comme un indicateur de suivi de la qualité des soins en salle de naissance. Lors des réunions collégiales dites « Revue de morbimortalité / Reprises de cas » portant d’une part sur des observations maternelles d’HPP sévère ou de rupture utérine sur utérus sain et d’autre part sur des observations néonatales d’anoxo-ischémie, il est recommandé d’analyser les modalités d’administration de l’oxytocine.
Source : Dossier de presse du CNSF, 06/01/17