L’infection urinaire (IU) peut avoir des conséquences néfastes pour la mère et pour le fœtus. Elle peut se manifester sous trois formes: colonisation urinaire gravidique (aussi appelée bactériurie asymptomatique), cystite aiguë gravidique et pyélonéphrite aiguë (PNA) gravidique.
Chez la femme enceinte, toute IU est par définition à risque de complication.
Les études chez la femme enceinte sont peu nombreuses et de qualité méthodologique parfois discutable, aussi certains choix reposent-ils sur les données de la population des femmes en âge de procréer. A efficacité et tolérance materno-fœtale comparables, les molécules ayant le spectre le plus étroit et le moindre impact sur le microbiote intestinal de la mère seront privilégiées.
- Facteurs favorisants :
Différents facteurs favorisants ont été individualisés :
- des modifications anatomiques, dont une compression directe de l’appareil urinaire par l’utérus gravide, en particulier du côté droit (par dextro-rotation de l’utérus). La dilatation physiologique des cavités pyélo- calicielles débute dès le premier trimestre et augmente de façon progressive jusqu’au troisième trimestre. Au fur et à mesure du développement de l’utérus, la vessie prend une position plus abdominale que pelvienne provoquant une dysurie, tandis que l’étirement des uretères favorise le reflux vésico-urétéral.
- des modifications hormonales. La progestérone aurait une action myorelaxante, favorisant une stase urétérale et une augmentation de la capacité vésicale.
des modifications des propriétés physico-chimiques des urines. L’activité bactéricide des urines pourrait être diminuée par la dilution des urines et l’augmentation de leur pH. - une immunodépression physiologique favorisant la présence de bactéries dans l’appareil urinaire.
Les facteurs de risque de colonisation urinaire gravidique sont les antécédents d’IU, l’activité sexuelle ainsi qu’un bas niveau socio-économique. En revanche, d’autres facteurs décrits dans des études anciennes présentant des biais méthodologiques ne sont pas retrouvés dans les études plus récentes en analyse multi- variée : il s’agit de l’âge, de l’âge gestationnel et de la multiparité.
Les facteurs de risque de PNA gravidique, ou d’IU requérant une hospitalisation en cours de grossesse sont l’antécédent d’IU, le jeune âge maternel, la nulliparité, ainsi qu’un bas niveau socio-économique (faibles revenus, faible niveau d’études, absence de conjoint, début tardif de suivi de grossesse). Ces derniers paramètres suggèrent qu’un suivi de grossesse insuffisant favoriserait l’évolution vers la PNA de colonisations urinaires gravidiques non traitées.
- Epidémiologie microbienne :
Les données d’épidémiologie microbienne (espèces et antibio-résistance) sont essentielles pour guider le traitement probabiliste des cystites et des PNA. Pour la colonisation urinaire, le traitement est documenté d’emblée, puisque le diagnostic n’est posé qu’après le résultat de l’examen cytobactériologique des urines (ECBU).
Les données proviennent principalement d’études sur la colonisation gravidique, dont l’épidémiologie microbienne est comparable à celle des IU chez la jeune femme en dehors de la grossesse. Les entérobactéries prédominent : E. coli est majoritaire devant d’autres entérobactéries (Klebsiella sp, Proteus mirabilis, Enterobacter sp) et Staphylococcus saprophyticus.
La prévalence des résistances de E. coli est comparable à celle observée chez les femmes jeunes hors de la grossesse, en particulier pour la résistance aux quinolones et la prévalence des entérobactéries productrices de bêta-lactamase à spectre étendu (EBLSE).
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Source : Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française, 31/12/2015